Charlotte Saluste, nous l’avons entendue à Banyuls-sur-Mer en 2009, elle avait alors 13 ans et déjà une personnalité et un jeu affirmés. Ce jour-là elle était accompagnée au piano par Rémi Geniet (16 ans alors) qui quelques années après, à 20 ans, a obtenu le second prix du concours international Reine Elisabeth. Rémi depuis poursuit une belle carrière de soliste. Charlotte de son côté a suivi les cours de la prestigieuse Yehudi Menuhin School de Londres et confirmé hautement ses qualités d’interprète. Elle a trouvé pour ce nouveau concert un partenaire de haute qualité, doté d’un forte présence : Nicolas Dross, déjà bien connu des Amis d’Alain Marinaro, qui, dès la rentrée, intégrera le Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris (CNSMD) où il vient d’être admis.

Le concert débuta par la sonate n°8 pour violon et piano en sol majeur op. 30 n°3 (1802). Ecrite au retour d’Heiligenstadt la sonate est dédiée au tsar Alexandre Premier, connu (entre autres) pour avoir supprimé la censure. En trois mouvements :allegro assai, tempo di minuettoet allegro vivace (ce dernier comportant quelques mélodies russes) les deux interprètes imposent leur jeu brillant et leur entente profonde. Une grande sensibilité marquait la Fantaisie en ut majeur op.131 de Robert Schumann qui suivait, sans que s’efface la précision du jeu affirmée dans la pièce précédente. Fine et sensible, Charlotte Saluste fait preuve aussi d’une volonté sans faille et d’une sûreté de jeu qui impressionne. Sûreté de jugement aussi pour le choix du morceau qui suit : la sonate pour violon et piano n°3 en la mineur de Georges Enesco (1926). La violoniste avoue ne pas tout aimer de ce compositeur qui annonce la musique moderne, parfois avec un grand bonheur, parfois d’une façon plus confuse. Pour l’œuvre que nous avons entendue, qu’elle apprécie particulièrement, c’est bien le bonheur, en effet, avec des pizzicati qui laissent une belle place au piano, des moments syncopés,  des aller et retours rythmés et l’occasion pour les interprètes de confirmer l’un et l’autre leur généreuse virtuosité. Le bis nous fut proche par le lieu : un Granados évocateur et bien connu pour ne pas rompre le lien.

Malgré les quelques difficultés que procurait au violon un temps horriblement dégradé, ce concert joué par Charlotte Saluste et Nicolas Dross, deux jeunes virtuoses à l’avenir prometteur, marqua, avec le chaleureux accueil des hôtes du Château Planères, une nouvelle réussite des Amis d’Alain Marinaro, et la grande joie de maintenir l’amitié.

Yvette Lucas